lundi 20 novembre 2006

LE POUVOIR D'ACHAT: Ceux qui perdent et ceux qui gagnent.

Qu'est-ce que le pouvoir d'achat?
Le pouvoir d'achat correspond à la quantité de biens et de services qu'un revenu permet à un individu de se procurer. A revenu constant, la hausse des prix entraîne une baisse du pouvoir d'achat, et inverssement pour une baisse des prix.

En France, le pouvoir d'achat augmente dans les statistiques. En va-t-il de même d'après la population?
Le ministre de l'Economie Thierry Breton affirme que "le pouvoir d'achat va augmenter de 2,3% cette année". Même si cette affirmation se vérifie dans les statistiques, elle ne correspond pas forcément à la réalité. Dans un premier temps, la hausse annoncée par Thierry Breton vient après un ralentissement brutal du pouvoir d'achat, en 2003 (+0,9%), suivi d'une reprise modérée: +2,2% en 2004 et 1,1% en 2005. Ces données étant largement infèrieures aux 3% des années 1998 à 2002.
De plus, l'économiste Michel Didier, à la tête de l'institut de conjoncture COE-Rexecode, reconnaît que "pour une partie importante des ménages, le pouvoir d'acaht a baissé ces dernières années." Effectivement, les jeunes, les familles monoparentales et les habitants de la capitale souffrent particulièrement de la hausse des prix. On remarque également que les employés, les salariés à temps partiel et les retraités ont vu leurs revenus s'éroder ou stagner.

Les salaires font-ils toujours à eux seuls le pouvoir d'achat et pourquoi?
Les salaires ne font plus à eux seuls le pouvoir d'achat: jusqu'en 1975, leur croissance annuelle, en termes réels, se situait autour de 3,5% en moyenne. Depuis, le rythme est d'environ 0,5% par an. La période récente confirme ces évolutions: de 1996 à 2005, le "salaire mensuel de base"-hors primes, indémnités et autres rémunérations- a progressé de 0,7%. Si l'on tient compte de ces compléments, le chiffre passe de 1%.
Néanmoins, le Smic échappe à ces règles: il bénéficie de différents coups de pouce, notamment du fait du passage aux 35 heures.

D'autres revenus jouent un rôle dans le pouvoir d'achat, mais ils restent différents entre les classes modestes et les classes aisées.

Pour les calsses modestes, ce sont les prestations sociales qui jouent un rôle essentiel."Grâce à un gros effort de restriction, la pauvreté dans la société française s'est réduite", note Sophie Boissard, directrice générale du Centre d'analyse stratégique. "Ceci explique en particulier que les écarts de revenus n'aient pas augmenté."
Pour les classes aisées, ce sont les revenus du patrimoine qui améliorent nettement l'ordinaire. Ces dernières années, ils sont particulièrement dynamiques (+4,9% en 2004 et +5,1% en 2005). Comme 10% des ménages les plus riches se partagent 40% des actifs, la manne n'est pas également répartie. Et cette situetion se transmet; aujourd'hui, plus de 13% des ressources des jeunes âgés de 25 à 35 ans viennent des donations, estime le Bureau d'informations et de prévisions économiques.

Finalement, quels sont ceux qui s'en sortent et ceux qui en souffrent?

Selon l'INSEE, entre 1996 et 2004, c'est le pouvoir d'achat des 10% les plus pauvres et celui des 10% les plus aisés qui a le plus progressé. Mais l'amélioration du sort des premiers est toute relative, puisque leurs revenus demeurent très bas.
Entre ces deux extêmes, une classe moyenne s'impatiente. Son devenir est désormais l'un des enjeux du débat politique.

Quelles-sont les raisons qui font que les ménages français n'arrivent plus à s'en sortir?

1. La hausse des prix n'est pas la même pour tous.
Les Parisiens par exemple, souffrent plus que d'autres, qui consacrent plus du cinquième de leurs dépenses au logement: entre 1998 et aujourd'hui, ce poste a bondi de 88%.
De même les jeunes et les familles monoparentales sont particulièrement touchés par la hausse du tabac (+ de 368% en 25ans): depuis 1989, ces deux catégories ont fait face à l'évolution cumulée des prix supérieure de 4 points à celle mesurée pour l'ensemble des ménages.

2.Les dépenses-contraintes augmentent.
Certaines factures ne sont pas négociables, comme les rembourcements d'emprunt, les charges de logement, les frais d'assurance ou encore le coût des transports publics. A elles seules, elles engloutissent, en moyenne, 39% du revenu disponible des ménages, estime Bipe dans une étude réalisée pour Michel Edouard Leclerc, un niveau jamais atteint.
D'autres dépenses se révèlent de plus en plus pénalisantes, comme l'entretien d'une voiture, les frais d'essence, certaines dépenses de santé, les frais d'éducation ou encore de garde d'enfants qui ont considérablement augmenté au cours des dernières années.
Quelque soit leur niveau de revenu, tous les ménages ont augmenté, de 3,7% en moyenne dans leur budget, leurs dépenses de communication au cours des dix dernières années. Il en va de même pour la culture et les loisirs.Et les plus modestes plus que tous les autres. Chez eux, contrairement à toutes les autres catégories, mêmes les dépenses liées à la voiture progressent: elles pèsent 8% plus lourd dans leurs dépenses qu'en 1995.

3.Les Français ont de nouvelles habitudes.
Le consommateur privilégie les dépenses de confort. Après l'energie et le tabac, ce sont les loisirs, les frais d'hôtel et les services domestiques, qui pèsent le plus sur le pouvoir d'achat: plus chers, ils ont aussi consommé davantage. Plus de 1 personne sur 2 possède un ordinateur à domicile et 1 sur 3 une connexion à Internet. Les Français dépensent toujours plus et ne perçoivent pas d'amélioration sur leur compte en banque: encouragée par le battage médiatique et la course à l'innovation, leur frénésie annihile l'amélioration de leur pouvoir d'achat.

4. Le rôle perturbateur de l'euro.
Entre 2000 et 2001, la grande distribution a fortement augmenté ses prix: de 4 à 6%. Il aura fallu l'intervention du ministère des Finances en mars 2001-et la signature d'un accord de "neutralisation des prix" jusqu'à mars 2002 par cinq organisations professionnelles-pour enrayer l'envolée. Depuis 2001, nombre de biens de consommation courante ont vu leurs prix flamber, notamment le pain, l'essence, le tabac ou encore le café. Et voilà pourquoi, cinq ans après l'arrivée de l'euro, les consommateurs associent toujours monnaie unique et inflation inique.

Mathilde BRIOT

2 commentaires:

Anonyme a dit…

l'article est tres bien realisé! le pouvoir d'achat constitue l'un des themes central de la poitique actuelle et pourtant la divergeance entre l'etat et la population parait conséquent... encore bravo pour le travail fourni.

Anonyme a dit…

Article intéressant car le pouvoir d'achat (c'est mon sentiment) a été trop longtemp délaissé. Or, il s'avère que la discordance entre les estimatons de l'INSEE et le ressenti de l'opinion publique a permis - c'est déjà pas mal -de s'interroger sur le mode de calcul du pouvoir d'achat. Au delà du simple aspect statistique, le pouvoir d'achat s'annonce comme un des sujets importants de la campagne présidentielle.
Bravo donc pour le traitement de ce sujet.